• Trilogie d'Icare (archives)

    I

    Je sens l'air filer sous mes doigts
    Une pression de la phalange
    Un basculement et je change
    Brusquement de direction. Vois

    Mes ailes magnifiques, blanches
    A en aveugler le soleil
    Au dessus des monts et merveilles
    Je vole, me dresse, me penche

    Plus près des étoiles, le gel
    Se fige sur mes bras glacés
    Je sens mon regard s'effacer
    Je ne peux plus bouger mes ailes

    Dans le sillon de ma descente
    J'entraîne de petits flocons
    Ensemble nous virevoltons
    Dans une spirale brillante

    A terre je suis endormi
    Dans le profond sommeil des limbes
    La neige immaculée me nimbe
    D'un blanc éclaté teint de gris.

    II

    Au-dessus des eaux un ange est tombé
    Et du sol et des airs une musique
    Aux accents rêveurs et mélancoliques
    A me faire pleurer, enfant berger

    La neige danse sur ce triste thrène
    Elle crisse sous mes pas vers la mer
    Les vagues gelées semblent être fer
    Un ange est mort, la mer cache sa peine

    Je pose un pied sur la glace si frêle
    Mais elle ne se brise pas. Je marche
    Vers cet ange. Ses ailes font une arche
    La musique retentit, éternelle

    L'ange est un homme. Un garçon grand et fort
    Ses cheveux figés par le froid sont blonds
    Je ne le connais pas, mais la chanson
    Qui m'entoure me fait pleurer sa mort.

    III

    Dors, mon amour, encore, sous la couverture
    De mes plumes, Icare n'est pas mort, il vit
    A jamais dans le cœur de son père endeuillé
    Il s'est fait un grand lit des plumes effeuillées
    sous la chaleur du soleil dont il n'a plus envie
    Il dort, le petit ange, loin de toute aventure

    Non mon fils, jamais plus les cruels éléments
    N'atteindront ta personne, sois sûr de cela
    Que ton papa est là, et que tout va bien
    Ne nous quittons plus, fils, ne brisons plus ce lien
    Morts Roi Minos, Minotaure, voici le glas
    Des monstres qui peuplent ce monde encor vivant

    Tu es à l'abri, mon fils
    Toi, mon unique
    Mon magnifique
    Toi, mon sacrifice
    Icare n'est plus
    Qu'un souvenir
    Un simple rire
    Ange déchu

    Et moi son père, je ne pus me résoudre à le perdre. Depuis ce jour je guette le moment, quand Icare frappera à ma porte, et nous nous prendrons dans les bras l'un de l'autre. Je ferai la plus belle des hécatombes pour en remercier les dieux. Chaque jour un peu plus de vent s'entasse dans mes yeux, et avec les étoiles je guette le bruissement d'ailes libérateur.
    Reviens, Icare! Reviens, mon fils !


    A mon père.

    « HaikuAnnales d'une jouvencelle qui eut l'heur... »

  • Commentaires

    1
    Mercredi 31 Octobre 2012 à 19:40

    J'adore. Rien de plus à dire, c'est si complexe de pleins de belles choses qui palpitent en moi quand je découvre des beaux mots pareils.

    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :




    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :